Un président très silencieux, un entraineur encore en vacances, un effectif qui se déplume, l’OM aura-t-il perdu la boussole? Rarement, un mois de juin n’aura été si angoissant pour le supporter de l’OM. Gignac, Ayew, Morel, Fanni et Payet, les cadres de l’équipe ont mis les voiles laissant perplexes les suiveurs de l’OM. A peine arrivé dans son nouveau club de West Ham, Dimitri Payet a déclaré être venu à Londres pour « un projet clair ». Le tacle sur l’OM est évident sauf à considérer que Payet ne faisait plus partie du nouveau projet de l’OM. Ce qui n’est pas loin d’être vrai en dépit du communiqué du club, pur artifice de communication destiné aux supporters et pas à Dimitri Payet.
ALL IN SUR BIELSA!
Dans ce nouveau projet, c’est Marcelo Bielsa l’homme-fort. Sauf accident cataclysmique, le coach argentin sera l’entraineur de l’OM la saison prochaine et la direction olympienne entend lui laisser les mains libres. Longtemps en froid, Bielsa et Labrune se reparlent et (enfin) travaillent ensemble. Les dirigeants olympiens ont bien compris que Bielsa est un fort actif pour le club. L’Argentin est un romantique du football, un philosophe de la tactique, qui joue l’attaque avant de penser à défendre. Depuis son arrivée, les supporters redonnent de la voix au Vélodrome. La côte d’amour est immense. Vincent Labrune, amateur de paris et de poker, va donc tenter pour la saison prochaine un all in sur Marcelo.
Ce « tout pour Bielsa » est quand même conditionné à des impératifs économiques et financiers que chacun connait. D’abord, Margarita Louis-Dreyfus ne veut pas remettre la main au pot chaque année sans la garantie de résultat. La veuve de RLD se comporte en patronne froide et en mère attentionnée. Ok elle garde l’OM jusqu’à nouvel ordre pour faire plaisir à ses enfants (Kyril surtout) mais elle ne dilapidera pas une partie de leur héritage en salaire de joueurs ou en transfert. Avec plus de 100 millions d’euros de budget, MLD considère que l’OM peut s’auto-financer. L’autre impératif est l’examen de la DNCG, la direction nationale de contrôle et de gestion, gendarme financier des clubs de ligue 1. La donne pour cette année est connue: l’OM devra vendre avant le 1er juillet pour effacer les pertes et repartir sur des bases saines.
UN BUSINESS MODÈLE BIELSO-COMPATIBLE
Vincent Labrune et la direction olympienne reconnaissent volontiers que l’OM est trop dépendant économiquement d’une qualification en Ligue des Champions. Si on y est, ça va. Si on n’y est pas, c’est la cata. La saison dernière, la 4ème place de l’OM a immédiatement imprimé au club une politique de rigueur incompatible avec les prolongations de Gignac, Morel, Ayew et même Fanni. Prenons André. Si l’OM le prolongeait une saison, c’était plus de 10 millions d’euros engagé sur le joueur sans avoir aucune garantie de la transférer pour un montant au moins équivalent. Les moins-values légendaires agacent la direction olympienne qui veut y mettre un terme. Sans faire de sentiments ou de favoritisme. Dans cette optique, des départs de Nicolas Nkoulou ou Steve Mandanda sont plausibles en cas de belles offres. Si, par exemple, Jean-Michel Aulas met 20 millions d’euros pour Nkoulou-Mandanda, on peut parier que l’OM les vendra.
« Bayern du Sud », « Projet Dortmund », longtemps l’OM s’est cherché un modèle en terme de business. Celui que souhaite suivre dorénavant l’OM est le FC Porto, champion du mercato. En clair, ça veut dire acheter jeune, pas cher en transfert, pas gourmand en salaire. Sous les ordres de Bielsa, le joueur s’épaissit, gagne en temps de jeu, s’expose et s’il flambe, le club le vendra 3 fois la mise de départ. Avec un salaire bas, l’OM entend maitriser sa masse salariale et éviter de plomber son porte-monnaie sur la durée du contrat. Au delà des considérations sportives, l’exemple Gignac fait mal, très mal. Economiquement parlant, c’est un même un accident. L’attaquant, désormais au Mexique, aura coûté pas loin de 60 millions d’euros (salaires, charges, primes, indemnité de transfert) à l’OM sans que le club y retrouve ses sous. Autre aspect de cette nouvelle ligne directrice, le turnover sera plus grand. Le système de jeu proposé par Bielsa étant tellement exigeant, peu de joueurs accepteront de s’époumoner plus de 2 saisons.
PORTO’S PROJECT
Le « Projet Porto » pourrait coller à Bielsa. L’idée de façonner des joueurs en devenir n’est pas pour lui déplaire. Mais ce doit être des joueurs que lui et son staff auront choisis. La direction olympienne, échaudée par le précédent Doria, a bien compris le message. Le club s’est engagé à lui fournir ce qu’il attend dans le cadre de ce « projet Porto »: ce sera essentiellement des joueurs de Ligue 1 ou qui connaissent bien la Ligue 1. Car Marcelo estime que ce championnat est particulier nous dit-on.
Sur le papier, le nouveau projet de l’OM se tient. En terme de business au moins. Après, on peut se poser la question de savoir si un club de football a pour vocation les plus-values financières ou les titres acquis après une belle lutte sportive. Marcelo Bielsa en mai dernier avait lui même répondu à la question : »Nous qui sommes dans le football, on croit que la récompense est juste dans les trophées et dans l’argent. C’est vrai, l’argent est une récompense, les titres aussi. Mais il y a un troisième élément d’une valeur incalculable, qui n’est pas nécessairement une conséquence des titres ou de l’argent, qui est la capacité à procurer des émotions et qui établit un lien entre une équipe et ses supporters. Si quelqu’un gagnait des titres et de l’argent et ne pourrait pas profiter de ce point, ce travail n’en vaudrait pas la peine. L’idéal est l’émotion, les titres et les honoraires. Si je pouvais choisir une seule des trois choses, je choisirais les émotions car ce sont les seules qu’on ne peut substituer. »
Le projet Porto peut-il apporter argent, titres et émotions? Labrune et Bielsa y travaillent. Les supporters attendent de voir.
