Nous sommes juste après le premier match de la saison tout juste perdu par l’OM face à Caen. Diego Reyes, adjoint de Marcelo Bielsa, monte dans le salon où se trouve Vincent Labrune et 10 autres personnes. Dans sa main une enveloppe cachetée qu’il souhaite remettre le plus rapidement possible au président de l’OM. De la part de Marcelo. Selon un témoin de la scène, Vincent Labrune frustré par la défaite lui demande de remettre ça à plus tard. Reyes insiste arguant que Bielsa souhaite que Labrune lise la lettre avant la traditionnelle conférence de presse d’après match du coach argentin. Encore dans le match, Labrune le rembarre de nouveau et lui dit qu’il verra ça dans quelques minutes et que Marcelo Bielsa a le temps de faire sa conf’.
« IL EST DÉJÀ TROP TARD »
Un peu plus bas, on le sait maintenant, Bielsa, après 11 minutes insipides sur OM-Caen, lâche sa bombe: il démissionne de son poste d’entraîneur. La déflagration atteint Labrune et ses invités et, finalement, le président de l’OM finit par lire la lettre manuscrite de démission du coach argentin.
Il descend aussitôt et entre dans le bureau de Bielsa qui vient de terminer sa conférence de presse et d’adieu. Quand Labrune demande à Bielsa qu’est ce que c’est que ce bazar essayant de rattraper le coup, l’Argentin prend tout le monde à témoin et de court en lâchant « Vincent On est ensemble! » à tel point que Franck Passi chargé de traduire la discussion perd le fil car il comprend rien. « Qu’est ce que vous avez fait? » lance VL. Droit dans ses bottes, Bielsa répond qu’il a déjà signalé à Labrune qu’il ne voulait plus entendre parler de Philippe Pérez et Igor Levin pour conclure le contrat. Labrune tente une dernière fois de rattraper par la main Bielsa : « On s’en fout, on signe le contrat ensemble, là maintenant ». L’Argentin rétorque « qu’il est déjà trop tard » et ajoute « Vincent tu es le seul président dont je me sépare pas fâché ». La scène est surréaliste et Passi tente vaille que vaille de traduire quelque chose qu’il ne comprend pas.
IGOR LEVIN?
A la Commanderie, il est de notoriété publique que Marcelo Bielsa déteste Philippe Pérez, le monsieur qui dit non à cause des sous. Quand Marcelo Bielsa entre pour signer son contrat et qu’il découvre en plus de Pérez, Igor Levin, Bielsa devient méfiant. Igor Levin ne fait pas partie de l’organigramme du club. Il n’a aucune responsabilité à Marseille. Son lien avec l’OM? Il est administrateur sans trop de pouvoir d’Eric Soccer la holding propriétaire de l’Olympique de Marseille, nommé en 2014 par Margarita Louis-Dreyfus. Levin est un avocat américain d’origine russe. Il vit et possède un cabinet Levin Partners, PC à New-York. Il a 45 ans, il est diplômé de la New-York University School of Law en 1992. En 1993, il devint collaborateur d’un cabinet new-yorkais dont l’avocat star collabore un peu avec Robert Louis-Dreyfus dans le droit des affaires et le droit fiscal. En 2002, il ouvre son propre cabinet. Parcours classique pour un homme sans relief au visage rond et qui cache derrière des lunettes un œil de verre. En 2009, on ne sait pas trop comment, il s’impose auprès de Margarita Louis-Dreyfus. Il dit à la tsarine ce qu’elle veut entendre et devient son factotum juridique. Notons que l’OM et le foot ça ne lui parle que de très loin. Lui, il pense surtout au groupe Louis-Dreyfus, tentaculaire qui pèse entre 50 et 60 milliards d’euros de chiffres d’affaires. D’ailleurs sur la place juridique de New-York, on ne lui connait pas d’autres clients que Margarita Louis-Dreyfus.
SCENARIO DE THRILLER POLITIQUE
Revenons à la réunion avec Bielsa. Pensant signer un contrat dûment établi le 15 juin dernier, Marcelo voit cet Igor Levin venir l’emmerder sur quelques dizaines de milliers d’euros alors que le contrat au total (toutes clauses confondues) s’élève à 7 millions d’euros. Un record dans l’histoire de l’OM. Levin fait le barbot, fort de la confiance de Margarita, et pinaille sur quelques points. Fier comme un pape, se sentant pris au piège, Bielsa s’en va et sans signer. La suite est connue. Il écrit sa lettre de démission, joue la comédie le jeudi, joue face à Caen le samedi et claque la porte dans la foulée.
Alors de deux choses l’une. Soit Marcelo savait déjà qu’il refuserait le contrat car il a d’autres propositions et il agit comme ça pour sniper Levin et Pérez tout en préservant Labrune. L’épisode du départ de Van Winckel laisse à penser que proposition il y a. Soit c’est Margarita Louis-Dreyfus qui a mandaté Levin pour faire le sale boulot, c’est-à-dire faire capoter l’accord parce que trop cher pour elle. Mais au final, Vincent Labrune ressort du feuilleton sans trop d’égratignures. On dirait presque un épisode de House of Cards. Mais avè l’accent!