CHRONIQUE – CARTE BLANCHE POUR MATT
Chaque mardi, Matthieu Franceschi, l’un des supporters olympiens les plus influents de ces dernières saisons, a carte blanche. Cette semaine, l’ex porte-parole des South Winners adresse une lettre ouverte au légendaire Basile Boli…
Cher Basile,
Pour moi, et je pense pour plusieurs générations de supporters marseillais aussi, tu es l’un des joueurs les plus emblématiques et les plus charismatiques de la riche histoire olympienne. Tu as bercé mon enfance aux débuts des années 90 et j’envie tous ces fidèles qui ont pu, à l’époque, vivre les exploits de cette équipe façonnée par Bernard Tapie, depuis les tribunes. Si on me dit « Basile Boli ? », trois images me viennent immédiatement à l’esprit…
Comment oublier tes larmes de Bari le 29 mai 1991 ? Cette Coupe des Clubs Champions était un rêve malheureusement brisé par les yougoslaves de l’Étoile Rouge de Belgrade, dans un match dominé du début jusqu’à la fin par un OM stérile, s’inclinant cruellement aux tirs aux buts. La principale image gravée dans nos mémoires restera ton visage inondé de larmes, à la fin du match, devant l’immense virage des supporters marseillais. J’avais onze ans, je regardais le match sur écran géant avec mon club de foot, tous maquillés de bleu et blanc, je m’en rappelle comme si c’était hier. Nous pleurions tous avec toi, ou plutôt tu pleurais avec tous les supporters marseillais.
Comment oublier ton but victorieux à Munich le 26 mai 1993 ? Nous connaissons tous la scène par coeur. A la 44ème minute, Abedi Pelé tire le corner devant le virage bleu et blanc et tu t’arraches, malgré ta blessure, au-dessus de Franck Rijkaard, pendant que Franco Baresi te retient par le maillot, pour placer ton coup de tête et envoyer le ballon au fond des filets de Sébastiano Rossi. Tu marques le but le plus important de l’histoire de l’Olympique de Marseille, but qui nous permet de dire avec fierté que nous sommes « à jamais les premiers » en France à avoir gagné la Ligue des Champions. Une victoire prestigieuse et éternelle face au grand Milan AC… Quel pied ! En écrivant ces quelques lignes, j’en frissonne encore comme tous les supporters en me remémorant cet instant inoubliable. A la fin du match, tu n’oublieras pas, devant le virage marseillais, de faire référence à la finale perdue deux ans plus tôt en mimant que tu ne pleures plus. La présentation du trophée, dès le lendemain au Stade Vélodrome, avec ton mythique « Aux armes » du milieu de la pelouse reste aussi un épisode indélébile.
Comment oublier ton coup de boule face au PSG le 29 mai 1993 ? Trois jours après la Ligue des Champions, tu marques dans un Vélodrome en fusion un but surréaliste qui contribuera à décrocher la victoire synonyme de dixième titre de Champion de France pour l’OM. Là encore, l’action est inoubliable. Tu es au départ dans le rond central, une tête en direction d’Abedi Pelé, qui passe à Jean-Philippe Durand qui jongle et te renvoie le ballon, tu décales Abedi sur le côté gauche qui centre vers toi et tu catapultes, de l’entrée de la surface, le ballon de la tête dans la lucarne du portier parisien, Bernard Lama. Pour l’anecdote, tu raconteras que tu voulais avant tout « emplâtrer » le défenseur Ricardo. Un but tout aussi légendaire que celui de Munich.
Basile, tu es un dieu vivant pour tous les amoureux de l’OM. C’est pour cela que j’écris en temps que simple amoureux du club, car ton glorieux passé olympien doit rester l’unique image que nous avons de toi. Mais voilà, depuis plusieurs semaines, alors que le club s’enfonce dans une crise qui était prévisible dès l’été dernier, tu es en train de te ridiculiser et de contribuer à l’effondrement du club en étant l’objet de communication de Vincent Labrune, l’un des pires présidents de l’histoire olympienne.
En mai 2013, tu avais pourtant une vision assez juste de l’Olympique de Marseille en disant : « Labrune n’est pas un homme du foot. Il ne sait pas ce que c’est. Si lui et Anigo s’en vont de Marseille, les clubs ne vont pas se battre pour les récupérer. A part Endoume… ». Depuis, la donne a changé puisque tu es devenu, en septembre 2015, l’ « Ambassadeur du club », après de nombreuses turbulences estivales au club avec le départ de Bielsa ou la rocambolesque fin de mercato. Officiellement, ta fonction « consiste à développer des contacts en matière de partenariat et à finaliser le musée du club au stade Vélodrome » comme l’indiquait le site du club. Ta fonction initiale est bien loin de la réalité. En fait, officieusement, tu es le bouclier médiatique du président.
Prendre un joueur emblématique du club dans l’organigramme olympien est, au départ, une très bonne idée de Vincent Labrune. Dans tous les grands clubs, il y a des anciennes gloires et à Marseille, le phénomène reste assez rare. Mais voilà, le président est un spécialiste pour transformer les bonnes idées en fiasco. A l’arrivée, tu es devenu l’ « Ambassadeur » de Vincent Labrune plutôt que l’ « Ambassadeur » de l’institution OM. Plus les semaines s’enchaînent, plus le club coule, plus le président t’envoie au charbon pour défendre son image indéfendable et du coup, tu irrites une grande partie des supporters qui pourtant t’ont toujours idolâtré. Être le héros de Munich ne te donnera pas une immunité éternelle.
Tu n’as cessé, à plusieurs reprises, de cracher sur Marcelo Bielsa tout en embellissant Michel malgré les mauvais résultats. Je retiens notamment une sortie remarquée dans un média proche de Labrune, le JDD : « L’aura de Bielsa était disproportionnée. (…) Il s’est barré comme un voleur. Je préfère être dans la peau de Michel que dans la sienne. Oui, son équipe ne joue pas très bien mais je ne suis pas inquiet ». A cette époque, la communication de crise du fameux « board » était de salir encore et toujours le technicien argentin tout en fermant les yeux sur la chute sportive de l’équipe. Tu as commencé à perdre de la crédibilité et les premières critiques à ton égard sont apparues.
Puis, en même temps que le changement de cap de la direction olympienne, afin de désigner Michel comme seul et unique responsable du fiasco, tu tires actuellement les yeux fermés sur un entraîneur que tu défendais pourtant sans retenue. Drôle de retournement de veste alors que le jeu de l’équipe a toujours été proche du néant. Après le match de Bordeaux, tes paroles en zone mixte, qui transpirent la marque de ton président, sont incroyables et ne peuvent que continuer à enfoncer le club qui subit une guerre interne entre Labrune et Michel : « On a un attaquant qui a marqué 14 buts et qui n’est pas aligné, une équipe très renouvelée. Celle-ci n’est pas faite pour aller au charbon ni relever le défi. Elle n’a pas été à la hauteur. Je suis surpris et bouleversé par les choix de Michel. »
Quel est l’intérêt d’une telle déclaration publique si ce n’est celui de servir de bouée de sauvetage à Labrune ? Pourquoi ne pas dire les choses en interne, loin des journalistes ? Ceci ne serait-il pas plus constructif ?
Ce mardi, tu n’hésites pas à remettre une couche dans Le Parisien, média proche de ton président (ai-je besoin de le préciser à chaque fois ?), en te permettant même de critiquer les supporters quant à leur comportement verbal vis à vis de l’épouse de Vincent Labrune. Pourtant dimanche soir, à chaud, tu disais comprendre la révolte de ces mêmes supporters : « Je suis plus que triste, il n’y a pas de mot. Les supporters ont raison à 100% ».
En quelques heures, as-tu changé d’avis où dois-tu suivre à la lettre la communication de crise mise en place ?
Basile, tu étais notre idole, tout Marseille espère que tu le restes toujours. Tu dois ouvrir les yeux et ne plus contribuer à la mort du club en soutenant des incompétents incapables de reconnaitre leurs erreurs, ne cessant de se cacher derrière une multitude d’excuses pour faire croire qu’ils sont des génies incompris…
Basile, sors de ce personnage qui salit ta réputation légendaire, ne sois plus ce « Basilooser » et redevient ce « Basilou » dont les supporters sont si fiers, ce grand homme qui a posé le drapeau phocéen sur le toit de l’Europe, ce joueur d’exception qui représente nos valeurs, bien loin de celles de ton président.
Ne laisse pas une poignée de dollars rayer ton histoire.
Reste grand, ne coule pas en même temps que ceux qui ont saboté le navire OM.
Amitiés olympiennes.
Matthieu Franceschi