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ITW FCM : Perrin, réseaux sociaux, centre de formation de l’OM… L’ancien entraîneur de la réserve livre ses vérités (Dossier FCM)

Par Mourad Aerts - Mis à jour le - Publié le
Lucas PERRIN of OM during the Ligue 1 match between Monaco and Marseille at Stade Louis II on September 15, 2019 in Monaco, Monaco. (Photo by Pascal Della Zuana/Icon Sport) - Lucas PERRIN - Stade Louis-II - Monaco (France)

En marge du gros dossier FCM sur la formation, nous vous proposons certains entretiens réalisés dans ce cadre…

 

David Le Frapper a été l’entraîneur de la réserve de l’OM pendant trois saisons, de 2016 à 2019. L’actuel coach de l’EUGA Ardziv est donc un interlocuteur de choix lorsqu’il s’agit d’aborder les thématiques en relation avec le centre de formation marseillais.

 

 

« PERRIN C’est un exemple très fort ! »

 

Vous insistez beaucoup sur l’importance de l’entourage du jeune dans sa réussite. Est-ce qu’au final l’entourage c’est aussi important que le talent ? 

 

 
David Le Frapper : « Oui c’est un peu ça, l’entourage est presque aussi important que le talent. Pour moi, le meilleur des talents c’est le travail. Voilà, j’ai du talent mais comment je l’exprime ? La meilleure façon c’est au quotidien à travers des entraînements, des matches, ma façon de me comporter. Le talent ce n’est pas que “dribbler un joueur”, c’est aussi savoir être à la disposition d’un groupe, d’un club. Etre à l’écoute, c’est ça le talent.

 

Si un joueur a du talent mais qu’il te fait gagner au détriment des autres en formation, ça ne m’intéresse pas.
Le talent c’est aussi savoir s’exprimer avec les autres, c’est être à l’heure le matin, rester après l’entraînement pour travailler certaines choses… C’est beaucoup d’éléments, c’est pour ça que c’est dur la formation. »

 

 

 

Lucas Perrin, que l’on voit désormais régulièrement en équipe première, est un peu l’illustration du garçon équilibré qui a ce talent du « travail » ? 

 

 

David Le Frapper : « Il y en a plein comme Perrin mais c’est vrai que lui c’est un exemple très fort.
Bouba, aussi, a du talent, du pur et dur mais il est aussi talentueux au quotidien par son entourage, son comportement à l’entraînement et vis-à-vis des autres.

 

Lucas avait moins de talent que Bouba mais avec le travail et son sérieux dans les horaires et les entraînements, ça lui a permis de combler ses manques. Et aujourd’hui avec le temps et sa manière d’organiser sa formation, il touche du doigt ce qu’il avait envie de toucher depuis longtemps : être pro à l’Olympique de Marseille et jouer ! Parce qu’être pro à l’OM, ça ne veut rien dire. Un vrai pro, c’est celui qui joue. »

 

 

 

Les horaires, le travail à l’entraînement, l’entourage… En fait une grande partie de la formation se passe en dehors des matches…

 

 
David Le Frapper : « Une fois que le match se termine, le plus dur commence.
Déjà parce qu’il faut être ultra sérieux par rapport à ce que l’on va vous dire de votre prestation. À l’OM ou ailleurs, il y aura toujours des personnes pour vendre un rêve à l’enfant qui n’est peut-être pas accessible. Ça, à moyen terme, ça peut détruire l’enfant. Ça, c’est non contrôlable. À ce moment-là ni le travail du formateur ni celui du préparateur mental n’existe plus. C’est vachement dur à maîtriser parce que l’enfant vous dira ce qu’il a envie de vous dire.
Ce sont presque plus nos enfants que nos propres enfants parce que eux, on ne les voit pas toute la journée.

 

Après les matches, j’avais un fonctionnement où j’interdisais les gens que je ne connaissais pas d’approcher les joueurs. À part s’il s’agissait de l’agent officiel présenté par la famille mais sinon “Stop ! Vous n’avez rien à lui dire, déjà c’est un mineur. » »

 

 

« Les réseaux sociaux ont un impact négatif »

 

 

Il existe un nouveau paramètre à prendre en compte avec les réseaux sociaux sur lesquels les « pépites » sont désormais scrutées à la loupe…

 

 

David Le Frapper : « Ça a un impact négatif.
Quand nous, formateurs, on a au quotidien le joueur et que le weekend, on est dans le perfectionnement sur certains compartiments bien précis du jeu et que, sur les réseaux, on pense le contraire et on l’écrit, ça va à l’encontre de ce que nous, on peut leur dire.
Et ils peuvent après ne plus être à l’écoute car ils vont se préoccuper de savoir s’ils sont mis en avant ou pas sur les réseaux. On va pouvoir peut-être y lire que le jeune a fait un bon match alors que nous, on attendait autre chose. Lorsque l’on va lui dire, il ne va pas comprendre.

Il faut être attentif à ça, aux infos qui y circulent, pas toujours exactes. Certaines infos peuvent même être propagées par des proches. Souvent ça va impacter des personnes un peu moins structurées, celles qui le sont déjà mentalement n’ont pas besoin des réseaux sociaux pour savoir s’ils ont fait un bon match ou bien travaillé sur leurs axes de progression. 

 

En fait la chose la plus importante c’est la relation de confiance entre entraîneur et entraîné notamment lorsqu’il faut leur parler de leurs points faibles et leurs points forts. 

 

Je lis de temps en temps les réseaux sur des jeunes que j’ai pu avoir et j’hallucine. C’est abusé de mettre un gamin de 15 ans ou 16 ans dans une telle exposition et d’en parler comme d’une future star… Personne ne le sait ça ! Il y a trop de facteurs qui peuvent encore intervenir entre sa préformation, sa formation et la dernière étape qui est d’aller chercher les professionnels. On revient encore et toujours à l’entourage. »

 

 

 

 

Justement entre la formation et la dernière étape, aller chercher les professionnels, il y a souvent cette tentation de partir en prêt pour s’aguerrir parce qu’il est extrêmement difficile de se faire sa place en équipe première à l’OM. Le prêt pour les jeunes, est-ce une bonne idée pour vous ? 

 

 

David Le Frapper : « Forcément quand t’as 17, 18 ans et que ça fait deux ans que tu es très bon en National 2, il faut se poser des questions pour continuer à progresser. Est-ce que le bon choix c’est d’aller en prêt puis de revenir un an plus tard ?

 

C’est un vrai travail de réflexion autour d’une table avec toutes les parties concernées. J’en reviens toujours au même : mais quand l’enfant est bien accompagné par sa famille, par ses proches, ça se passe toujours mieux. Mais attention, aller jouer avec les pros, ça a un vrai côté pervers parce que ça brille. Il ne faut pas que le jeune aille s’entraîner avec les pros et se disent “bah j’ai le même niveau que lui.” Parce que peut-être que le pro était à 50% et toi à 100%. Tout ça, c’est un discours que doit avoir le formateur. Et quand tu redescends en National 2, tu te dis “ ça y est, j’ai signé professionnel et on me demande d’aller jouer à Fréjus alors que je m’entraîne avec des pros qui vont aller au Parc des Princes.” C’est là où un préparateur mental peut être important. Parce qu’on va lui apporter des choses mais il y en aura d’autres qui vont nous échapper. Certains sont attentifs mais ce sont toujours les joueurs les plus intelligents qui sont les plus attentifs. »

 

 

 

Vous avez fréquenté d’autres centres de formation comme ceux de Châteauroux ou de Valenciennes, par rapport à ces expériences passées, comment jugez vous le niveau du centre de formation de l’OM ? 

 

David Le Frapper :  « À Valenciennes, il y a toujours eu des jeunes parce qu’il y a un vécu plus important sur la formation.
Au niveau des installations aussi, le club avait déjà inauguré un nouveau centre d’entraînement il y a pas mal d’années… Et puis ce sont deux mentalités différentes, c’est sûr qu’il y a moins de pression qu’il y a pu en avoir à Marseille du fait que l’OM est très exposé. Surtout quand on annonce qu’on va finir dans les cinq premiers centres de formation de France…

Pour en revenir à Valenciennes et à ta question précédente, il y a un certain nombre de joueurs qui y sont passés récemment qui sont maintenant installés en Ligue 1. Et pourtant l’année où ont explosé les Mbenza, les Tousart, les Fulgini, les Niakhaté… Avec tous ces joueurs-là, en National 3, on a failli descendre en DH ! On s’est sauvés à la dernière journée à Croix qui n’avait pas perdu un match de l’année.
Tous ces joueurs, ils font une année encore en 19 ans pour certains puis quand Casoni est parti, on les a tous fait monter directement en Ligue 2. Aujourd’hui, ils ont tous des valeurs marchandes. Un à Lyon, un en Allemagne, l’autre à Nice… Derrière, il y avait aussi Upamecano. Bref, il y avait un vrai projet de club. Donc c’est difficile de comparer mais il faut laisser le temps à Marseille de s’installer.

 

Ça reste pour moi un jeune club formateur avec des ambitions nouvelles, une politique différente, des structures différentes… Ça va prendre un peu de temps mais il y a un vrai potentiel et un vrai vivier dans la région. Faut leur laisser le temps de travailler. Dans le futur, l’OM aura des bons joueurs qui sortiront de son centre de formation s’ils continuent à bien travailler. »

 

Tous propos recueillis par Mourad Aerts

 

 

 

 

 

 

 

 

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