Nous avons eu le plaisir de discuter avec Éric Roy juste avant la reprise de la Ligue 1.
Si tout le monde (ou presque) a une opinion sur l’OM actuel, celle du consultant de BeIn Sports a peut être un peu plus de valeur que d’autres. Il faut en effet se souvenir qu’il a été partenaire de Franck Passi en 92/93, joueur de l’Olympique de Marseille quelques années plus tard juste après la vente du club à RLD et entraîneur propulsé numéro 1 pour sauver son club en 2010 (à Nice). Beaucoup de paramètres qui font de lui un interlocuteur de choix pour analyser l’actualité marseillaise.
Dans cette première partie d’interview, il nous parle tactique et jette son regard sur Franck Passi.
La Tactique : « Par rapport à la construction de l’effectif, le 4-2-3-1 me parait logique. »
Bonjour Éric, on voudrait avoir votre opinion sur le schéma tactique de l’OM. Franck Passi semble avoir opté pour un 4-2-3-1. Cela vous semble t-il être la solution adaptée à l’effectif vu les profils à se disposition, notamment offensifs ?
Éric Roy : « Je pars du principe qu’un entraîneur doit s’adapter aux profils à sa disposition et qu’il ne doit pas forcer pour imposer un schéma à ses joueurs. Et quand on regarde l’effectif marseillais aux postes offensifs, on a Cabella, Thauvin, Alessandrini, Sarr, Khaoui et même Nkoudou qui n’est pas encore parti. Ça fait six joueurs qui sont capables de jouer à des postes d’insertion offensive.
Donc aujourd’hui le 4-2-3-1 me paraît logique, oui. Par rapport à la construction de l’effectif, ça me parait la meilleure des solutions.
Après tout dépend de leurs dispositions sur le terrain. Est-ce qu’on les fait jouer sur leur bon pied ou en « faux pied ». Ça concerne Alessandrini notamment qui a très bien joué comme ça, sur son bon pied, le long de la ligne quand il était à Clermont mais qui joue désormais en « faux pied » à droite.
Dans ce cas-là, si tu joues avec des faux pieds, il faut que tes latéraux prennent les couloirs. C’est primordial pour l’animation offensive. Bédimo a le profil pour le faire, Sakaï, je ne le connais pas encore assez.
Mais pour revenir à cette ligne de trois, Franck Passi a de la qualité dans ce secteur et des alternatives. Il peut décider de les faire plus centrer ou de les faire plus rentrer vers l’intérieur pour libérer des espaces aux latéraux. Il a des options intéressantes. »
Pour ce premier match, on part plutôt vers une ligne de trois où les ailiers rentrent dans l’axe, l’apport de Bédimo et Sakaï sera donc déterminant offensivement ?
Éric Roy : « Oui mais attention lorsque les latéraux sont très hauts, il faut avoir un équilibre derrière et ça, ça va être l’affaire des deux milieux de terrain. C’est un peu la problématique aujourd’hui. Qui seront-ils ?
Diarra ? C’est encore une inconnue sur le long terme. Mais c’est sûr que le Diarra des six premiers mois de l’année dernière offrirait beaucoup de garanties dans ce système.
Par contre, le Diarra de seconde partie de saison diminué par sa blessure au genou peinerait plus. Et qui à ses cotés ?
C’est bien d’avoir des latéraux offensifs mais il faut avoir des joueurs derrière qui équilibrent, capables de courir pour eux. Si t’as des joueurs hauts, il faut aussi immédiatement aller au pressing dans le camp de l’adversaire. Et encore une fois, le pressing haut c’est bien mais quand tu passes à travers, ça peut être un retour de bâton très dommageable. C’est ce que l’on avait un peu vu avec Bielsa en seconde partie de saison par exemple
Ce sera à Franck de trouver le bon équilibre. »
Son regard sur Franck Passi : « Je me souviens de quelqu’un avec de la personnalité, un vrai gagneur ! »
Justement en parlant de Franck Passi, vous êtes bien placé pour comprendre sa position.
Étant donné qu’il y a une certaine similitude dans la manière dont vous arrivez en poste à Nice et dans celle qui a propulsé Passi numéro 1 à l’OM. Vous étiez déjà tous les deux dans le club depuis un moment mais à des postes différents avant que l’on fasse appel à vous pour sauver les meubles durant une saison compliquée.
Éric Roy : « Oui sauf que moi j’étais directeur sportif et lui était adjoint depuis un certain temps. Il a donc accumulé de l’expérience sur les terrains tous les jours. Alors que moi, je suis plutôt passé des bureaux aux terrains du jour au lendemain. Il est sans doute plus préparé que je ne l’étais à l’époque.
Lorsque l’on est directeur sportif, on passe plus de temps à voyager, à regarder des joueurs… On ne voit son équipe s’entraîner qu’une fois de temps en temps. J’ai un peu appris les mains dans le cambouis et ça a été très formateur. Très prenant, passionnant.
Moi en tout cas, ça m’a donné envie c’est pour ça que par la suite j’ai passé mes diplômes et que j’aimerais bien retrouver un banc. Surtout que ces diplômes, je les ai passé avec un certain Zidane qui a depuis gagné quelques petits titres (rires). »
Vous êtes plutôt optimiste alors quant à la réussite de Franck Passi en tant qu’entraîneur cette saison ?
Éric Roy : « Oui, sa force, c’est que comme moi à l’époque à Nice il connaît bien le club et tous ses rouages. Après Marseille, ça reste difficile. C’est un club très passionné, pas facile pour une première expérience.
Mais en connaissant déjà tous les joueurs, tous les tenants et tous les aboutissants dans le club, ça lui permet de gagner du temps ! C’est sûr que je vais suivre ce que va faire Franck attentivement cette saison parce que je peux comprendre ce qu’il ressent, ce qu’il va connaître.
Ne pas avoir d’expérience en tant que numéro 1 ne veut pas forcément dire se planter. Moi, mon bilan a été plutôt bon quand j’ai repris Nice, on a perdu un seul match sur les onze qui restait et c’était contre le Marseille de Didier Deschamps qui a terminé champion cette année-là. »
On lui reproche souvent son manque de charisme, le fait qu’il ne paraisse pas être un meneur d’hommes…
Éric Roy : « Je ne sais pas. On a joué ensemble à Toulon en 92/93 et pour moi c’était plutôt quelqu’un avec de la personnalité, un vrai gagneur. Un vrai professionnel qui respectait beaucoup son métier. De mon coté, j’ai plutôt des bons à-priori sur lui. »
C’est aussi dû au fait qu’il ait longtemps été adjoint…
Éric Roy : « Avoir été longtemps adjoint, ça n’a pas empêché Galtier de s’imposer sur la durée à Saint-Étienne.
Aujourd’hui tout le monde peut parler mais s’il gagne les trois premiers matches, tout le monde dira qu’il est l’homme de la situation. Ses résultats parleront pour lui. Je ne lui souhaite que du bien car autrement malgré tout ce qu’il a pu faire pour le club avant, on oubliera tout.C’est malheureusement la dure loi du football. »
Retrouvez la deuxième partie de l’interview sur notre site.
Propos recueillis par Mourad Aerts