OM Di Meco: «Que des mecs qui mourraient les uns pour les autres»
Par Benjamin Courmes - Mis à jour le - Publié le
OM Di Meco: «Que des mecs qui mourraient les uns pour les autres»
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Alors que l’OM fêtera l’anniversaire des 20 ans de son sacre en Ligue des Champions ce dimanche, Eric Di Meco revient pour Football Club de Marseillesur cette victoire face au grand Milan un 26 mai 1993 qui aura marqué à jamais l’histoire du club phocéen et du foot français: A jamais les premiers!
Que vous reste-t-il en mémoire de cette rencontre 20 ans plus tard?
Eric Di Meco: Pas grand chose du match en lui-même. C’est surtout la libération au coup de sifflet final. On a la tête qui tourne et on se rend compte de ce qu’on a fait. Ensuite c’est la joie des gens et le retour à Marseille où c’était vraiment de la folie de Marignane jusqu’au vélodrome.
« Ce qu’on avait à faire, on le savait »
Quel était le plan pour battre le grand Milan de Baresi, Van Basten, Rijkard, qui était largement favoris ?
E.D.M: On ne peut pas dire que l’on avait mis un plan en place pour les battre car on savait comment les battre. On les avait éliminé deux ans auparavant. On était programmé pour les rencontrer et pour les battre depuis que Tapie était arrivé au club. On n’était peut-être pas favoris mais par contre on savait qu’ils nous craignaient et on savait surtout qu’on avait les armes pour les embêter. On a en fait beaucoup utilisé les qualités du Milan AC dans notre jeu. On jouait la ligne derrière en étant haut et en faisant le pressing. Je me souviens d’ailleurs que dans ce match-là, il y a eu beaucoup de hors jeu des deux côtés, notamment en première mi-temps. Contre cette équipe-là, il ne fallait pas lâcher du terrain. Ce n’est jamais évident de le faire car il y a toujours une prise de risque quand tu joues haut et la ligne comme on l’avait fait. Ce qu’on avait à faire on le savait, mais depuis deux ans. On les avait sorti en 1991 et on les avait battu en 1992 (1-0) en match amical. Donc on avait les clés.
Vous rappelez vous de votre prestation ce soir là?
E.D.M: J’ai souffert comme mes potes au début du match. On a passé la deuxième mi-temps à défendre. On a été tous solide physiquement et mentalement. Pour ce donner une note sur un match comme ça c’est difficile. J’avais simplement fait en sorte que ça ne passe pas dans mon couloir.
On dit que la préparation s’est déroulée dans une étonnante décontraction. La finale perdue de Bari n’était plus du tout présente dans les têtes?
E.D.M: Elle était bien dans les têtes puisqu’on avait fait exactement l’inverse de ce que l’on avait fait à Bari. On n’était que trois avec Basile (Boli) et Abédi (Pelé) à avoir joué cette finale de 91, donc la grande majorité du groupe n’avait pas connu ça. Par contre, on s’était servi de tout ce qu’on avait fait là-bas pour faire l’inverse car on s’était vraiment trompé dans la préparation
On vous entend souvent dire que certains matchs pouvaient se gagner dans le tunnel. Celui-là en fait parti?
E.D.M: Je ne vais pas raconter qu’on les a impressionné dans le tunnel car ce n’était pas une équipe impressionnable. Les mecs, c’étaient quand même des monstres! C’est vrai que le face à face dans le tunnel nous servait souvent à nous motiver. Personnellement, j’aimais bien les matchs de coupe d’Europe pour ça, car ce n’était pas des mecs que tu rencontres toute l’année. Du coup, tu peux jouer un peu d’intox, ce qu’on avait pu faire dans le tunnel à l’époque. Alors c’est vrai que tu peux gagner des matchs dans le tunnel mais tu peux surtout ne pas les perdre parce que tu montres à l’adversaire que tu n’as pas peur d’eux. C’est ce qu’on avait fait ce soir là. Le fait qu’ils nous craignaient parce qu’on les avait déjà beaucoup embêté, c’est une réalité.
« On était moins fort que deux ans avant »
Comment définiriez-vous cette équipe de 93 par rapport aux autres sous l’ère Tapie?
E.D.M: C’était pour moi celle qui avait le plus de caractère de ces six années là. Celle qui avait le plus de talent, pour moi, c’était celle de 89/90. La plus forte c’était celle de 91. Celle de 93 reste celle qui avait le plus de personnalité, de « cojones« . Il n’y avait que des guerriers avec Rudy Voller, Boli, Macel… Mais on était moins fort que deux ans avant et moins talentueux que trois avant. L’équipe avec laquelle je me suis le plus régalé de jouer c’était celle de 89, avec Francescoli, Papin, Mozer, Förster, Amoros. C’était vraiment la plus talentueuse.
De retour à Marseille, on vous voit en larme dans le vélodrome avec la coupe. Qu’avez vous ressenti à ce moment là, vous qui aviez tout connu à l’OM?
E.D. M: C’est la qu’on c’est vraiment rendu compte du bonheur qu’on avait procuré aux gens. On était content de ce qu’on avait fait, mais l’impact que cela avait eu à Marseille, on s’en est seulement rendu compte en revenant. c’était vraiment la folie. En plus c’est vrai que personnellement j’avais une relation particulière avec le public car j’avais été formé au club, j’étais arrivé en 80, j’avais vécu l’histoire des minots et toutes les années Tapie. Je représentais en quelque sorte l’identité du club et les supporter m’avaient réservé la plus grosse ovation… Alors quand je me suis retrouvé dans le stade avec la coupe j’ai failli tomber dans les pommes. C’est surement le moment le plus fort de toute ma carrière.
Le groupe était-il vraiment soudé?
E.D.M: Oh oui! Dans cette équipe, il n’y avait que des mecs qui mourraient les uns pour les autres. Je ne dis pas qu’il n’y avait que des potes. Mais sur le terrain, chacun laissait sa vie pour l’autre.
« La chute a été brutale »
Malheureusement la fête est rapidement gâchée par l’affaire VA-OM qui a éclaté quelque jours après, comment avez vous vécu cette chute brutale?
E.D.M: Pas très bien forcément même si on ne s’est pas tout de suite rendu compte car quelques jours après il y a le match contre Paris où on ramasse le titre de champion. Ensuite, il y a une semaine de fête. On avait été reçu à Paris par Mitterrand et après on était parti en vacance. Donc personnellement j’ai suivi ça de loin en réalité. Ça avait été le feuilleton de l’été. Tous les matins il y avait un nouveau truc au journal. Et quand on est revenu, ça nous est tombé dessus. Les mois de Juillet-Aout ont été un enfer car il y avait tous les jours une mauvaise nouvelle: On ne va pas faire la coupe Intercontinentale, on ne va pas défendre notre titre en coupe d’Europe… Finalement, on aura profité que quelques jours de ce titre-là. La chute a été brutale. C’est encore une déchirure aujourd’hui, car quand on parle du titre de 93, on est obligé de parler aussi de ça.
Et ne pas pouvoir pu défendre votre titre la saison d’après, ce devait être frustrant?
E.D.M: Oui c’est clair, mais pour moi la plus grosse frustration de ma carrière c’est de ne pas avoir pu disputer la coupe intercontinentale contre le meilleur club du monde. C’est vraiment ce à quoi on pense quand on gagne ce titre-là.
Il y a quelques années vous aviez contacté vos anciens coéquipiers pour tenter de récupérer le titre de 93, retiré suite à l’affaire VA-OM. Avez-vous abandonné cette idée?
E.D.M: C’est exact j’avais contacté tous mes anciens coéquipiers, et ils m’avaient tous signé un papier étant d’accord avec la démarche que j’allais entreprendre. J’avais crée une association et pris un avocat et à l’époque ça ne c’était pas très bien passé avec la Ligue et la Fédération. Je ne pensais pas que 20 ans après les gens de ces instances-là étaient aussi renfermés et aussi peu à l’écoute d’ arguments qui, à mon sens, tenaient la route . Et puis quand, 20 ans après, j’entends encore certaines réflexions sur le titre de 93, je me rends compte que ce titre-là a rendu aussi beaucoup de gens malheureux. Il y a des gens qui ont eu la haine et qui la crachent toujours aujourd’hui. Ma démarche n’était pas de raviver la haine ni de ré-ouvrir des cicatrices. Il y a des gens qui n’ont pas été clairs dans les instances et je me suis rendu compte que ça posait beaucoup de problèmes, donc j’ai laissé tombé et peut être que je reprendrai un jour quand tout sera calmé.
Pour les moins de 20 ans, pouvez-vous expliquer ce qu’est un tacle « à la Di Meco »?
E.D.M: Je ne sais pas si on peut l’expliquer. Il faudrait peut être leur montrer les vidéos, même si aujourd’hui ce serait peut être interdit aux moins de 18 ans… C’était un tacle avec beaucoup d’engagement et d’impact et avec toujours l’idée de jouer le ballon…
» Le problème c’est qu’il y avait les jambes qui traînaient au milieu »
Même quand c’était sur Fournier?
E.D.M: Ha! Le fameux sur Fournier, je touche bien le ballon si mes souvenirs sont bons. Le problème c’est qu’il y avait les jambes qui traînaient au milieu… Ça c’est un peu dommage. En tout cas c’était un exercice que j’aimais faire, et ça m’a permis de passer des soirées tranquilles parfois.
Comment jugez-vous l’évolution du football? On l’impression que les contacts ne sont presque plus tolérés aujourd’hui?
E.D.M: Oui cela a évolué et dans le bon sens malgré tout, car le but du jeu c’était de protéger les attaquants et moi je n’ai pas de soucis par rapport à ça. Et quand on me dit que je n’aurais pas pu jouer aujourd’hui, c’est faux je me serais adapté. Je serais allé jusqu’à la limite comme on le faisait à l’époque. Par contre ce qui me gonfle quand je vois un match, c’est qu’au moindre contact l’arbitre siffle. Ça hache le jeu et c’est vraiment pénible. En Ligue des champions on ne le voit pas. Les arbitres laissent beaucoup plus jouer un C1 et du coup le spectacle est de meilleur qualité. Quand les joueurs français se retrouvent en coupe d’Europe, dès qu’on les touche ils tombent, et ils sont étonnés que l’arbitre ne siffle pas.
« Les bisous dans le tunnel, j’ai un peu du mal avec ça »
Et les joueurs qui se tapent la bise dans le tunnel avant les matchs?
E.D.M: Je préférerai qu’ils se fassent des bisous après le coup de sifflet final. Là, il n’y a pas de soucis. Mais les bisous dans le tunnel, j’ai un peu du mal avec ça. Mais bon, c’est aussi comme ça maintenant… Nous, quand on jouait contre des potes on ne se regardait pas, ou on se regardait de travers avant de rentrer sur le terrain. Je ne dis pas que c’était bien mais ensuite une fois que le match est fini, c’est terminé pour moi.
Et finalement, après toutes ces années Olympiennes, qu’est ce que ca fait d’avoir signé dans une filiale du PSG?
E.D.M: En tout cas je peux dire que j’ai une liberté totale d’expression. Depuis que je suis suis arrivé, on ne m’a jamais repris de volé sur le PSG. Et dieux sait que je ne les ai pas épargné que ce soit à la télé ou à la radio. Je n’ai jamais eu de retour des dirigeants même sur les commentaires de matches. C’est effectivement le même président mais je n’ai jamais eu de recommandation. Pour moi ce sont deux entités différentes. En plus cette année on ne peut pas dire qu’on a fait de propagande pour le PSG car on ne les a vraiment pas beaucoup diffusé par rapport à Canal+
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